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La France fait marche arrière sur la responsabilité des entreprises dans l'Union européenne

Le gouvernement devrait apporter son soutien aux mesures pour éliminer le travail forcé des chaînes d'approvisionnement

Un magasin Decathlon à Lyon en France, le 3 décembre 2022.  © 2022 Julien Reynaud/APS-Medias/Abaca/Sipa USA via AP Photo

Le gouvernement français entrave la mise en œuvre d'une législation historique sur la responsabilité des entreprises dans l'Union européenne, malgré les preuves persistantes des liens entre de grandes entreprises françaises et des violations des droits humains.

Le 6 février, une enquête du média français Disclose, réalisée en collaboration avec l'émission de télévision Cash Investigation, a révélé que des vêtements fabriqués pour l’enseigne française de sport Decathlon proviennent d'usines en Chine recourant au travail forcé des Ouïghours.

L'enquête a montré qu'une filiale d'un fournisseur important de Decathlon exploitait une usine au Xinjiang, où elle participait aux programmes de transfert de main-d’œuvre parrainés par le gouvernement chinois, contraignant des Ouïghours et d’autres musulmans turciques à migrer vers des zones urbaines pour travailler dans des usines. Ce fournisseur a également accueilli des travailleurs ouïghours transférés dans ses usines de la province du Shandong.

Human Rights Watch a documenté la manière dont, depuis 2017, le gouvernement chinois commet des crimes contre l'humanité au Xinjiang, notamment le travail forcé.

L'enquête de Disclose affirme que Decathlon était au courant de la possible présence de travail forcé dans sa chaîne d'approvisionnement depuis 2021, mais n'a pas pris les mesures nécessaires pour y remédier. Le 10 février, Decathlon a déclaré à Human Rights Watch que « toute allégation qui porte atteinte à nos principes est rigoureusement examinée dans le cadre d'une enquête approfondie menée par nos propres équipes de conformité et des parties externes ». L’entreprise n’a toutefois pas répondu à la question de Human Rights Watch sur le maintien ou non de ses relations avec le fournisseur identifié dans l’enquête de Disclose comme étant lié au travail forcé des Ouïghours. Un tel lien devrait inciter Decathlon à se désengager immédiatement.

En 2024, l'UE a adopté deux lois majeures pour lutter contre la complicité des entreprises dans les violations des droits humains. La première, la directive sur le devoir de vigilance en matière de durabilité des entreprises (Corporate Sustainability Due Diligence Directive, CSDDD), impose aux grandes entreprises de faire preuve de vigilance raisonnable en matière de droits humains et d'environnement dans leurs chaînes d'approvisionnement mondiales. La seconde interdit les importations de biens produits par le travail forcé. Les deux lois devraient entrer en vigueur en 2027.

Malheureusement, la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, avec le soutien des gouvernements français et allemand, pousse en faveur d’une législation « omnibus » qui risque d'affaiblir la directive sur le devoir de vigilance et deux autres législations.

Les liens de Decathlon avec le travail forcé montrent que les violations des droits humains peuvent être bien plus proches de chez soi qu’on ne l’imagine. Plutôt que de saper les efforts en matière de responsabilité des entreprises, la France devrait veiller à ce que l’Union européenne reste à l’avant-garde de la lutte contre le travail forcé et les autres atteintes aux droits humains à travers le monde.

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